Pierre Perrin : Le silence fertile, en regard de quelques contemporains

Le Silence fertile
[P. Perrin, inédit]

Il est doux de voir ses amis par goût et par estime ; il est pénible de les cultiver par intérêt ; c’est solliciter. La Bruyère

À Paris, le ciel pourlèche vos paupières. Coudes serrés, chapeau, cravate, vous parlez fort, de tous côtés, et riez de vos bons mots croisés comme des lames. La certitude dans les talons, la campagne ne m’a guère appris à ricocher entre les hommes.

Le moindre bruit, même débonnaire, me fait taire.

La pauvre vie, la vie toute nue, notre unique trésor à la tombe promis, qui tremble de sombrer chaque matin plus fort, nous porte comme la mer. Êtes-vous paquebot, je me sens un esquif. Pourtant nous partageons de proches embruns.

Chacun se livre, aveugle et sourd, à son secret.

Un cœur de rose à traverser de part en part s’ouvre, se déploie, qui toujours davantage élève son chant. La poésie m’aura fait vivre à ma mesure ; je n’en veux pas à l’horizon. Lorsque mes dents se serreront pour la dernière fois, je redirai merci.

Que germe alors, ou non, le silence fertile !


Pierre Perrin, [Des jours de pleine terre, 2001]


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